Le Cancer :Une maladie qui tue en silence !

24 octobre 2012

Le Cancer :Une maladie qui tue en silence !

Alternative medicine from Africa, par Focx Photography

Au Niger, certaines femmes délaissées par leur mari se tournent vers la pharmacopée traditionnelle pour qu’il soit sexuellement plus ardent à leur égard. S’introduisant des produits hétéroclites dans le vagin, elles pavent sans le savoir la voie à un cancer redoutable. Pour leur plus grand mal.

« Je n’avais que 38 ans lorsque mon mari m’a annoncé qu’il voulait se remarier avec une jeune fille de 17 ans, raconte M.A., une mère de cinq enfants adossée à un mur du quartier de Sabon Carré de Zinder, le visage triste et manifestement anéantie par la maladie. J’ai consulté une amie et cette dernière a suggéré que ma féminité s’était affaissée et que c’était pour cela que mon mari voulait prendre une fillette. Elle me conseillait de me « rajeunir » et m’a donnée une série des produits traditionnels. Un mois plus tard, j’avais des symptômes comme des leucorrhées, des douleurs pelviennes et des saignements peu abondants mais fréquents. Je n’avais plus du plaisir. Je voyais bien que j’étais malade mais je ne savais pas ce que j’avais. Plus tard, on m’a dit que c’était le cancer du col de l’utérus… Mais comme la maladie a été diagnostiquée tardivement, les chances de guérison sont réduites. »

Le malheur des uns faisant le bonheur des autres, certaines femmes vendent ces médicaments traditionnels de porte en porte, donnant force « conseils » sur leur mode d’emploi ! « Je circule dans les services à longueur de journée en liquidant ces produits que les femmes utilisent pour la nuit – Koudi ko Motta, 1 million, Vitesse, etc. – et je vous assure que je gagne bien ma vie, dit Hadjia Maria, 53 ans, une sage-femme retraitée devenue commerçante au quartier Rahin Madame. Mais à chaque fois que je vends un produit, je mets l’accent sur l’hygiène, c’est-à-dire de ne pas appliquer le produit si la femme a des lésions vaginales car ces médicaments sont fabriqués à base des feuilles et de cendres. »

« A l’origine du cancer du col de l’utérus, il y a un certain nombre de facteurs de risques, explique-t-elle. Et le premier est l’infection par le virus du papillome humain. Chaque fois qu’une femme a un cancer du col, on retrouve ce type de virus quand on fait l’examen. Mais il y a d’autres facteurs. Des infections génitales banales mais aussi d’autres traumatismes qui peuvent intervenir au niveau du col. Si celui-ci est déjà fragilisé, l’infection trouve un terrain favorable. Cette infection, la femme ne la sent pas et ça passe inaperçu. Malheureusement, le mal évolue sans bruit et dénature les cellules normales du col qui deviennent finalement cancéreuses. »

Issoufa Harou, gynécologue obstétricien à la Maternité centrale de Zinder, confirme : « Le cancer du col – comme le cancer en général d’ailleurs – est une prolifération anarchique de cellules qui deviennent folles, qui grandissent et se multiplient. Normalement, les cellules ne dépassent pas une certaine taille, un certain volume. Quand ces dernières deviennent cancéreuses, elles augmentent constamment de volume et de taille, détruisant tout au passage. Elles ne s’arrêtent jamais jusqu’à la mort de l’individu. Voilà ce qu’on appelle le cancer en général. Pour le cancer du col, c’est cette même anomalie qui survient au niveau du col de l’utérus, c’est-à-dire à l’entrée de l’utérus .C’est à ce niveau que ce cancer se développe. Et c’est une multiplication de cellules de façon anormale et anarchique qui se poursuit de façon indéfinie. Et tant qu’il n’y a pas de traitement, cette multiplication continue. Rien ne peut l’arrêter. »

La rumeur laisse entendre que l’utilisation des médicaments traditionnels est à la base de ce mal. Qu’en pense le spécialiste ? «C’est ce que la rumeur laisse entendre, rétorque le docteur Harou. Du point de vue scientifique, le cancer du col est provoqué par un virus, le papillome virus humain, ou HPV selon l’acronyme anglais. C’est un groupe de virus dans lequel il y a plusieurs stéréotypes, nommés 16, 18, 31, etc. On a remarqué que ce type particulier de virus est à l’origine du cancer du col. Mais d’autres facteurs peuvent intervenir. Par exemple, une femme qui a accouché plus de cinq fois. Sur son col, il y a déjà des lésions préexistantes ou d’autres infections banales chroniques. Il y a donc de petites plaies sur le col. Si la femme est en contact avec ce virus, le cancer peut se développer plus facilement. Et si la femme utilise des produits traditionnels corrosifs, c’est-à-dire qui peuvent entraîner des lésions au niveau du col, cela peut favoriser aussi le cancer du col parce que le virus y trouvera un terrain tout préparé. Donc, ça va plus vite. On peut dire que les produits traditionnels contribuent dans un sens au développement de ce cancer même s’ils n’en sont pas le facteur le plus déterminant. »

Le cancer du col est donc une maladie sexuellement transmissible. Que la société le considère comme tabou ne se justifie en rien car son dépistage précoce permet d’éviter son développement. Le cancer, c’est certain, n’est pas une maladie qu’on attrape d’emblée. C’est une maladie qui prend des années à s’établir et à se manifester cliniquement. Mais lorsqu’on fait l’examen de dépistage, on peut détecter les lésions qu’on appelle précancéreuses grâce à un simple test fait à la maternité. Dans les pays développés, il y a même deux types de vaccins disponibles contre les types de virus incriminés dans la genèse du cancer du col de l’utérus et qu’on administre en général aux jeunes filles qui n’ont pas déjà eu de rapports sexuels.

Tout ça c’est pour dire qu’on peut prévenir le cancer du col de l’utérus, en faisant le test de dépistage des lésions précancéreuses, test offert dans les maternités du Niger. « C’est pour cela qu’on encourage les femmes à venir à la maternité pour faire le dépistage, ajoute le docteur Issoufa Harou. En plus, ce test est tout à fait gratuit ! »

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